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Regnum Galliae Regnum Mariae

Saint Bède le vénérable confesseur et docteur

27 Mai 2017 , Rédigé par Ludovicus

Saint Bède le vénérable confesseur et docteur

Office

Quatrième leçon. Bède, prêtre de Jarrow, né sur les confins de la Grande-Bretagne et de l’Écosse, n’avait que sept ans quand son éducation fut confiée à saint Benoît Biscop, abbé de Wearmouth. Devenu moine, il régla sa vie de telle sorte que, tout en se donnant entièrement à l’étude des arts et des sciences, il n’a jamais rien omis des règles monastiques. Il n’est pas de science qu’il n’ait acquise, grâce à des études approfondies ; mais il apporta surtout ses soins les plus assidus aux divines Écritures ; et, pour les posséder plus pleinement, il apprit le grec et l’hébreu. A trente ans, sur l’ordre de son supérieur, il fut ordonné prêtre et aussitôt, à la demande d’Acca, évêque d’Exham, il donna des leçons d’Écriture sainte ; il les appuyait si bien sur la doctrine des Saints Pères, qu’il n’avançait rien qui ne fût fortifié par leur témoignage, se servant souvent presque des mêmes expressions. Le repos lui était en horreur il passait de ses leçons à l’oraison pour retourner de l’oraison à ses leçons ; il était si enflammé par les sujets qu’il traitait, que souvent les larmes accompagnaient ses explications. Pour ne pas être distrait par les soucis temporels, il ne voulut jamais accepter la charge d’abbé qui lui fut bien des fois offerte.

Cinquième leçon. Bède s’acquit un tel renom de science et de piété, que la pensée vint à Saint Sergius, pape, de le faire venir à Rome, pour qu’il travaillât à la solution des difficiles questions que la science sacrée avait alors à étudier. Il fit plusieurs ouvrages, dans le but de corriger les mœurs des fidèles, d’exposer et de défendre la foi, ce qui lui valut à un tel point l’estime générale que saint Boniface, évêque et martyr, l’appelait la lumière de l’Église ; Lanfranc, docteur des Angles, et le concile d’Aix-la-Chapelle, docteur admirable. Bien plus, ses écrits étaient lus publiquement dans les églises, même de son vivant. Et quand le fait avait lieu, comme il n’était pas permis de lui donner le nom de saint, on l’appelait vénérable, et ce titre lui a été attribué dans les siècles suivants. Sa doctrine avait d’autant plus de force et d’efficacité qu’elle était confirmée par la sainteté de sa vie et la pratique des plus belles vertus religieuses. Aussi, grâce à ses leçons et à ses exemples, ses disciples, qui étaient nombreux et remarquables, se distinguèrent-ils autant par leur sainteté que par leurs progrès dans les sciences et dans les lettres.

Sixième leçon. Enfin, brisé par l’âge et les travaux, il tomba dangereusement malade. Cette maladie, qui dura plus de cinquante jours, n’interrompit ni ses prières, ni ses explications ordinaires des Saintes Écritures : c’est pendant ce temps, en effet, qu’il traduisit en langue vulgaire, à l’usage du peuple des Angles, l’Évangile de Saint Jean. La veille de l’Ascension, sentant sa fin approcher, il voulut se fortifier par la réception des derniers sacrements de l’église. Puis il embrassa ses frères, se coucha à terre sur son cilice, répéta deux fois : Gloire au Père, et au Fils et au Saint-Esprit et s’endormit dans le Seigneur. On rapporte qu’après sa mort, son corps exhalait l’odeur la plus suave : il fut enseveli dans le monastère de Jarrow et ensuite transporté à Dublin avec les reliques de Saint Cuthbert. Les Bénédictins, d’autres familles religieuses et quelques diocèses l’honoraient comme docteur : le Saint Père Léon XIII, d’après un décret de la sacrée congrégation des Rites, le déclara Docteur de l’Église universelle et rendit obligatoires pour tous, au jour de sa fête, la Messe et l’Office des Docteurs.

Au troisième nocturne.

Homélie de saint Bède le Vénérable, Prêtre.

Septième leçon. Par la terre, entendez la nature humaine ; par le sel, la sagesse. Le sel, de sa nature, fait perdre à la terre sa fécondité. Nous lisons de certaines villes, qui ont passé par la colère des vainqueurs, qu’elles ont été ensemencées de sel. Et ceci convient bien à la doctrine apostolique : le sel de la sagesse, semé sur la terre de notre chair, empêche de germer, et le luxe du siècle, et la laideur des vices. S’il n’y a plus de sel, avec quoi salera-t-on ? C’est-à-dire, si vous, qui devez servir aux peuples de condiment, vous perdez le royaume des cieux par crainte de la persécution, par une vaine terreur, il n’est pas douteux que, sortis de l’Église, vous ne deveniez le jouet de vos ennemis.

Huitième leçon. « Vous êtes la lumière du monde » : c’est-à-dire, vous qui avez été éclairés de la vraie lumière, vous devez être la lumière de ceux qui sont dans le monde. « Une cité bâtie sur la montagne ne peut se cacher » : il s’agit de la doctrine apostolique, fondée sur le Christ ; ou de l’Église, bâtie sur le Christ, formée de beaucoup de nations unies par la foi, et cimentée par la charité. Elle offre un asile sûr à ceux qui entrent, elle est d’un accès difficile à ceux qui approchent ; elle garde ceux qui l’habitent et elle refoule tous ses ennemis.

Neuvième leçon. « Et on n’allume point une lampe pour la mettre sous le boisseau, mais sur un chandelier ». Or celui-là met la lumière sous le boisseau qui obscurcit, voile la lumière de la doctrine en la faisant servir à des avantages temporels. Et celui-là met la lumière sur le chandelier qui se soumet de telle sorte au ministère de-Dieu, qu’il mette bien au-dessus de la servitude du corps la doctrine de la vérité. Ou bien encore : le Sauveur allume la lumière, lui qui a éclairé notre nature humaine par la flamme de la divinité ; et il a placé cette lumière sur le chandelier, c’est-à-dire sur l’Église, en marquant sur notre front la foi de son Incarnation. Cette lumière n’a pu être placée sous le boisseau, c’est-à-dire enfermée dans les dimensions de la foi et dans la Judée seulement, mais elle a éclairé le monde tout entier.

La bénédiction que le Seigneur donnait à la terre en s’élevant au ciel atteint les plus lointaines frontières de la gentilité. Trois jours de suite, le Cycle nous montre les grâces qu’elle annonçait concentrant sur l’extrême Occident leurs énergies : c’est le fleuve de Dieu, dont les eaux débordées se font plus impétueuses à la limite qu’elles ne dépasseront pas.

Hier, l’expédition évangélique que le roi Lucius avait sollicitée du Pontife Éleuthère quittait Rome pour la future Ile des Saints. Demain, dans la terre des Bretons devenue celle des Angles, elle sera suivie par le chef du second apostolat, Augustin, l’envoyé de Grégoire le Grand. Aujourd’hui, impatiente de justifier ces célestes prodigalités, Albion produit devant les hommes son illustre fils, Bède le Vénérable, l’humble et doux moine dont la vie se passe à louer Dieu, à le chercher dans la nature et dans l’histoire, mais plus encore dans l’Écriture étudiée avec amour, approfondie à la lumière des plus sûres traditions. Lui qui toujours écouta les anciens prend place aujourd’hui parmi ses maîtres, devenu lui-même Père et Docteur de l’Église de Dieu. Entendons-le, dans ses dernières années, résumer sa vie :

« Prêtre du monastère des bienheureux Pierre et Paul, Apôtres, je naquis sur leur territoire, et je n’ai point cessé, depuis ma septième année, d’habiter leur maison, observant la règle, chantant chaque jour en leur église, faisant mes délices d’apprendre, d’enseigner ou d’écrire. Depuis que j’eus reçu la prêtrise, j’annotai pour mes frères et pour moi la sainte Écriture en quelques ouvrages, m’aidant des expressions dont se servirent nos Pères vénérés, ou m’attachant à leur manière d’interprétation. Et maintenant, bon Jésus, je vous le demande : vous qui m’avez miséricordieusement donné de m’abreuver à la douceur de votre parole, donnez-moi bénignement d’arriver à la source, ô fontaine de sagesse, et de vous voir toujours. »

La touchante mort du serviteur de Dieu ne devait pas être la moins précieuse des leçons qu’il laisserait aux siens. Les cinquante jours de la maladie qui l’enleva de ce monde s’étaient passés comme toute sa vie à chanter des psaumes ou à enseigner. Comme on approchait de l’Ascension du Seigneur, il redisait avec des larmes de joie l’Antienne de la fête : « O Roi de gloire qui êtes monté triomphant par delà tous les cieux, ne nous laissez pas orphelins, mais envoyez-nous l’Esprit de vérité selon la promesse du Père. » A ses élèves en pleurs il disait, reprenant la parole de saint Ambroise : « Je n’ai pas vécu de telle sorte que j’eusse à rougir de vivre avec vous ; mais je ne crains pas non plus de mourir, car nous avons un bon Maître. » Puis revenant à sa traduction de l’Évangile de saint Jean et à un travail qu’il avait entrepris sur saint Isidore : « Je ne veux pas que mes disciples après ma mort s’attardent à des faussetés et que leurs études soient sans fruit. »

Le mardi avant l’Ascension, l’oppression du malade augmentait les symptômes d’un dénouement prochain se montrèrent. Plein d’allégresse, il dicta durant toute cette journée, et passa la nuit en actions de grâces. L’aube du mercredi le retrouvait pressant le travail de ses disciples. A l’heure de Tierce, ils le quittèrent pour se rendre à la procession qu’on avait dès lors coutume de faire en ce jour avec les reliques des Saints. Resté près de lui :»Bien-aimé Maître, dit l’un d’eux, un enfant, il n’y a plus à dicter qu’un chapitre ; en aurez-vous la force ? » — « C’est facile, répond souriant le doux Père : prends ta plume, taille-la, et puis écris ; mais hâte-toi. » A l’heure de None, il manda les prêtres du monastère, et leur rit de petits présents, implorant leur souvenir à l’autel du Seigneur. Tous pleuraient. Lui, plein de joie, disait : « Il est temps, s’il plaît à mon Créateur, que je retourne à Celui qui m’a fait de rien quand je n’étais pas ; mon doux Juge a bien ordonné ma vie ; et voici qu’approche maintenant pour moi la dissolution ; je la désire pour être avec le Christ : oui, mon âme désire voir mon Roi, le Christ, en sa beauté. »

Ce ne furent de sa part jusqu’au soir qu’effusions semblables ; jusqu’à ce dialogue plus touchant que tout le reste avec Wibert, l’enfant mentionné plus haut : « Maître chéri, il reste encore une phrase.— Écris-la vite. » Et après un moment : « C’est fini, dit l’enfant. —Tu dis vrai, répartit le bienheureux : c’est fini ; prends ma tête dans tes mains et soutiens-la du côté de l’oratoire, parce que ce m’est une grande joie de me voir en face du lieu saint où j’ai tant prié. » Et du pavé de sa cellule où on l’avait déposé, il entonna : Gloire au Père, et au Fils, et au Saint-Esprit ; quand il eut nommé l’Esprit-Saint, il rendit l’âme.

Gloire au Père, et au Fils, et au Saint-Esprit ! C’est le chant de l’éternité ; l’ange et mme n’étaient pas, que Dieu, dans le concert des trois divines personnes, suffisait à sa louange : louange adéquate, infinie, parfaite comme Dieu, seule digne de lui. Combien le monde, si magnifiquement qu’il célébrât son auteur par les mille voix delà nature, demeurait au-dessous de l’objet de ses chants ! Toutefois la création elle-même était appelée à renvoyer au ciel un jour l’écho de la mélodie trine et une ; lorsque le Verbe fut devenu par l’Esprit-Saint fils de l’homme en Marie comme il l’était du Père, la résonance créée du Cantique éternel répondit pleinement aux adorables harmonies dont la Trinité gardait primitivement le secret pour elle seule. Depuis, pour l’homme qui sait comprendre, la perfection fut de s’assimiler au fils de Marie afin de ne faire qu’un avec le Fils de Dieu, dans le concert auguste où Dieu trouve sa gloire.

Vous fûtes, ô Bède, cet homme à qui l’intelligence est donnée. Il était juste que le dernier souffle s’exhalât sur vos lèvres avec le chant d’amour où s’était consumée pour vous la vie mortelle, marquant ainsi votre entrée de plain-pied dans l’éternité bienheureuse et glorieuse. Puissions-nous mettre à profit la leçon suprême où se résument les enseignements de votre vie si grande et si simple !

Gloire à la toute-puissante et miséricordieuse Trinité ! N’est-ce pas aussi le dernier mot du Cycle entier des mystères qui s’achèvent présentement dans la glorification du Père souverain par le triomphe du Fils rédempteur, et l’épanouissement du règne de l’Esprit sanctificateur en tous lieux ? Qu’il était beau dans l’Ile des Saints le règne de l’Esprit, le triomphe du Fils à la gloire du Père, quand Albion, deux fois donnée par Rome au Christ, brillait aux extrémités de l’univers comme un joyau sans prix de la parure de l’Épouse ! Docteur des Angles au temps de leur fidélité, répondez à l’espoir du Pontife suprême étendant votre culte à toute l’Église en nos jours, et réveillez dans l’âme de vos concitoyens leurs sentiments d’autrefois pour la Mère commune.

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