Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Regnum Galliae Regnum Mariae

Jeudi de la Pentecôte

1 Juin 2023 , Rédigé par Ludovicus

Jeudi de la Pentecôte

Collecte

Dieu, qui avez instruit en ce jour les cœurs des fidèles par la lumière du Saint-Esprit : donnez-nous, par le même Esprit, de goûter ce qui est bien ; et de jouir sans cesse de la consolation dont il est la source. Par Notre-Seigneur … en l’unité du même Esprit.

Lecture Ac. 8, 5-8.

En ces jours-là, Philippe, étant descendu dans la ville de Samarie, leur prêchait le Christ. Et les foules étaient attentives aux choses que Philippe disait, écoutant d’un commun accord, et voyant les miracles qu’il faisait. Car beaucoup d’esprits impurs sortaient de ceux qu’ils possédaient, en poussant de grands cris. Beaucoup de paralytiques et de boiteux furent aussi guéris. Il y eut donc une grande joie dans cette ville.

Évangile Lc. 9, 1-6

En ce temps-là : Jésus ayant assemblé les douze apôtres, leur donna puissance et autorité sur tous les démons, et le pouvoir de guérir les maladies. Puis il les envoya prêcher le royaume de Dieu et guérir les malades. Et il leur dit : Ne portez rien en route, ni bâton, ni sac, ni pain, ni argent, et n’ayez pas deux tuniques. Dans quelque maison que vous soyez entrés, demeurez-y et n’en sortez pas. Et lorsqu’on ne vous aura pas reçus, sortant de cette ville, secouez la poussière même de vos pieds, en témoignage contre eux. Étant donc partis, ils parcouraient les villages, annonçant l’Évangile et guérissant partout.

Office

1ère leçon

Homélie de saint Ambroise, Évêque.

Les préceptes évangéliques nous enseignent comment doit être celui qui annonce le royaume de Dieu : il faut qu’il soit sans bâton, ni sac, ni chaussure, ni pain, ni argent, c’est-à-dire qu’il ne recherche point les secours et les appuis de ce monde, mais que, fort de sa foi, il pense trouver d’autant mieux ces choses, qu’il les recherche moins. Ces mêmes paroles de l’Évangile, on peut, si l’on veut, les entendre aussi comme nous enseignant à spiritualiser les affections de notre cœur. Le cœur, en effet, semble se dépouiller comme d’un vêtement matériel, lorsque, non content de rejeter l’ambition et de mépriser les richesses, il renonce encore aux séductions de la chair. Aux prédicateurs de l’Évangile, il est donné avant tout le précepte général de porter la paix, de maintenir la constance, de garder les lois qu’imposé l’hospitalité ; ce précepte affirme qu’il est malséant pour un prédicateur du royaume céleste de courir de maison en maison et de méconnaître les lois de l’inviolable hospitalité.

2e leçon

Mais comme la gratitude pour le bienfait de l’hospitalité est prescrite, il est aussi commandé aux disciples, s’ils ne sont point reçus, de secouer la poussière, et de sortir de la ville. Ce qui nous apprend que la récompense de l’hospitalité ne sera pas un bien médiocre, c’est que non seulement nous apportons la paix à nos hôtes, mais que même, s’ils ont sur la conscience les taches de fautes commises par fragilité, elles leur seront enlevées par l’entrée et la réception des prédicateurs apostoliques. Ce n’est pas sans raison non plus que, dans l’Évangile de saint Matthieu, il est recommandé aux Apôtres de choisir la maison où ils doivent loger, afin qu’ils ne s’exposent point à l’occasion de violer les liens de l’hospitalité, en changeant de demeure. La même précaution n’est pas cependant requise de l’hôte, de crainte qu’en choisissant ceux qu’il reçoit, il n’exerce moins véritablement l’hospitalité.

3e leçon

Mais si ce précepte sur les devoirs de l’hospitalité, dans son sens littéral, est digne de respect ; l’enseignement céleste, dans le sens mystique, est plein de charmes. Lorsqu’on choisit une maison, on recherche un hôte digne. Voyons donc si ce n’est pas l’Église et le Christ qui sont désignés à nos préférences ? En effet, y a-t-il une maison plus digne de recevoir la prédication apostolique que la sainte Église ? Et le Christ ne nous semble-t-il pas devoir être préféré à tous, lui qui a coutume de laver les pieds de ceux qu’il reçoit, et qui ne souffre pas que ceux qu’il a reçus dans sa maison restent dans un chemin souillé ; mais qui, les trouvant couverts des taches de leur vie antérieure, daigne néanmoins les purifier pour l’avenir ? Jésus-Christ est donc le seul hôte que personne ne doit abandonner, que personne ne doit quitter pour un autre. C’est à lui qu’on dit avec raison : « Seigneur, à qui irons-nous ? Vous avez les paroles de la vie éternelle ; pour nous, nous croyons » 

Le divin Esprit qui tient unis dans un même tout les membres de la sainte Église, parce qu’il est lui-même unique, n’a pas seulement été envoyé pour assurer l’unité inviolable à l’Épouse du Christ. Cette Épouse d’un Dieu qui s’est appelé lui-même la Vérité, a besoin d’être dans la vérité, et ne peut être accessible à l'erreur. Jésus lui a confié sa doctrine, il l’a instruite en la personne des Apôtres. « Tout ce que j’ai entendu de mon Père, dit-il, je vous l’ai manifesté ». Mais comment cette Église, si elle est laissée à l’humaine faiblesse, pourra-t-elle conserver sans mélange et sans altération, durant la traversée des siècles, cette parole que Jésus n’a pas écrite, cette vérité qu’il est venu de si haut apportera la terre ? L’expérience prouve que tout s’altère ici-bas, que les textes écrits sont sujets à de fausses interprétations, et que les traditions non écrites deviennent méconnaissables par le cours des années.

C’est ici encore que nous devons reconnaître la divine prévoyance de notre Emmanuel montant au ciel. De même que pour accomplir le désir qu’il a « que nous soyons un, comme il est un avec son Père », il a député vers nous son unique Esprit ; ainsi, pour nous maintenir dans la vérité, il nous a envoyé ce même Esprit qu’il appelle l’Esprit de vérité. « Quand il sera venu, dit-il, cet Esprit de vérité, il vous enseignera toute vérité ». Et quelle est la vérité qu’enseignera cet Esprit ? « Il enseignera toutes choses, et il vous suggérera tout ce que je vous aurai dit ».

Rien donc ne se perdra de ce que le Verbe divin a dit aux hommes. La beauté de son Épouse aura pour fondement la vérité ; car la beauté est la splendeur du vrai. Sa fidélité à l’Époux sera parfaite ; car s’il est la Vérité, la Vérité est assurée en elle pour jamais. Jésus le déclare ainsi : « Le nouveau Consolateur que le Père vous enverra demeurera avec vous pour toujours, et il sera en vous ». C’est donc par l’Esprit-Saint que l’Église possédera en propre la vérité, et cette possession ne lui sera jamais enlevée ; car cet Esprit envoyé par le Père et par le Fils s’attachera à l’Église et ne la quittera plus.

C’est ici le moment de se rappeler la magnifique théorie de saint Augustin. Selon sa doctrine qui n’est que l’explication des passages du saint Évangile que nous venons de lire, l’Esprit-Saint est le principe de la vie dans l’Église ; étant donc l’Esprit de vérité, il conserve la vérité en elle, il la dirige dans la vérité, en sorte qu’elle ne peut exprimer que la vérité dans son enseignement et dans sa conduite. Il assume la responsabilité de ses paroles, comme notre esprit répond de ce que profère notre langue ; et c’est pour cela que la sainte Église est tellement identifiée avec la vérité par son union avec l’Esprit divin, que l’Apôtre ne fait pas difficulté de nous dire qu’elle en est « la colonne et l’appui ». Que l’on ne s’étonne donc pas si le chrétien se repose sur l’Église dans sa croyance. Ne sait-il pas que cette Église n’est jamais seule, qu’elle est toujours avec l’Esprit divin qui vit en elle, que sa parole n’est pas sa parole à elle, mais la parole de l’Esprit qui n’est autre que la parole de Jésus ? Or cette parole de Jésus, l’Esprit la conserve pour l’Église dans un double dépôt. Il veille sur elle dans les saints Évangiles qu’il a inspirés à leurs auteurs. Par ses soins, ces livres sacrés sont défendus contre toute altération, et ils traversent les siècles sans que la main de l’homme leur ait fait subir de changement. Il en est de même des autres livres du Nouveau Testament composés sous le souffle du même Esprit. Ceux dont se compose l’Ancien Testament sont également le produit de l’inspiration du divin Esprit. S’ils ne rapportent pas les discours de Jésus durant sa vie mortelle, ils parlent de lui, ils l’annoncent, en même temps qu’ils contiennent la première initiation aux choses divines. Cet ensemble des livres sacrés est rempli des mystères dont l’Esprit a la clef pour la communiquer à l’Église.

L’autre source de la parole de Jésus est la Tradition. Tout ne devait pas être écrit, et l’Église existait déjà que les Évangiles n’étaient pas encore rédigés. Cette Tradition, élément divin comme l’Écriture elle-même, comment aurait-elle survécu sans altération, si l’Esprit de Vérité ne veillait à sa garde ? Il la maintient donc dans la mémoire de l’Église, il la préserve de tout changement : c’est sa mission, et par la fidélité qu’il met à remplir cette mission, l’Épouse demeure en possession de tous les secrets de l’Époux.

Mais il ne suffit pas que l’Église possède la vérité écrite et traditionnelle, comme un dépôt scellé. Il faut encore qu’elle en ait le discernement, afin de pouvoir l’interpréter à ceux auxquels elle doit rendre les enseignements de Jésus. La vérité n’est pas descendue du ciel pour n’être pas communiquée aux hommes ; car elle est leur lumière, et sans elle ils languiraient dans les ténèbres, sans savoir d’où ils viennent et où ils vont. L’Esprit de Vérité ne se bornera donc pas à conserver la parole de Jésus dans l’Église comme un trésor caché, il en dirigera l’épanchement sur les hommes, afin qu’ils y puisent la vie de leurs âmes. L’Église sera donc infaillible dans son enseignement ; car elle ne pourrait se tromper ni tromper les hommes, puisque l’Esprit de Vérité la conduit en tout et parle par son organe. Il est son âme, et nous avons reconnu, avec saint Augustin, que lorsque la langue s’exprime, c’est l’âme que l’on entend.

La voilà, cette infaillibilité de notre mère la sainte Église, résultat direct et immédiat de l’incorporation de l’Esprit de Vérité en elle ! C’est la promesse du Fils de Dieu, c’est l’effet nécessaire de la présence du Saint-Esprit. Quiconque ne reconnaît pas l’Église pour infaillible doit, s’il est conséquent avec lui-même, admettre que le Fils de Dieu a été impuissant à remplir sa promesse, et que l’Esprit de Vérité n’est qu’un Esprit d’erreur. Mais celui qui raisonne ainsi a perdu le sentier de la vie ; il a cru nier seulement l’Église, et sans s’en apercevoir, c’est Dieu même qu’il a renié. Tel est le crime et le malheur de l’hérésie. Le défaut de réflexion sérieuse peut voiler cette terrible conséquence : elle n’en est pas moins rigoureusement déduite. L’hérétique a rompu avec le Saint-Esprit, en rompant de pensée avec l’Église : il pourrait revivre en retournant humblement vers l’Épouse du Christ, mais présentement il est dans la mort ; car l’âme ne l’anime plus. Écoutons encore le grand Docteur : « Il arrive parfois, dit-il, qu’un membre du corps humain soit coupé, une main, un doigt, un pied : l’âme suit-elle le membre ainsi séparé du corps ? Non ; ce membre, quand il était uni au corps, jouissait de la vie ; isolé maintenant, c’est la vie même qu’il a perdue. De même le chrétien demeure catholique tant qu’il est adhérent au corps de l’Église ; en est-il séparé, le voilà hérétique ; l’Esprit ne suit pas le membre qui s’est détaché ».

Honneur soit donc à l’Esprit divin pour la splendeur de vérité qu’il communique à l’Épouse ! Mais pourrions-nous, sans le plus affreux péril, imposer des bornes à notre docilité, aux enseignements qui nous viennent à la fois de l’Esprit et de l’Épouse que nous savons unis d’une manière si indissoluble ? Soit donc que l’Église nous intime ce que nous devons croire en nous montrant sa pratique, ou par la simple énonciation de ses sentiments, soit qu’elle déclare solennellement la définition attendue, nous devons regarder et écouter avec soumission de cœur : car la pratique de l’Église est maintenue dans la vérité par l’Esprit qui la vivifie ; renonciation de ses sentiments à toute heure est l’aspiration continue de cet Esprit qui vit en elle ; et quant aux sentences qu’elle rend, ce n’est pas elle seule qui prononce, c’est l’Esprit qui prononce en elle et par elle. Si c’est son Chef visible qui déclare la doctrine, nous savons que Jésus a daigné prier pour que la foi de Pierre ne défaille pas, qu’il l’a obtenu de son Père, et qu’il a confié à l’Esprit la charge de maintenir Pierre en possession d’un don si précieux pour nous. Si le Pontife suprême, à la tète du collège épiscopal réuni conciliairement, déclare la foi dans l’accord parfait du Chef et des membres, c’est l’Esprit qui dans ce jugement collectif prononce avec une majesté souveraine pour la gloire de la vérité et la confusion de l’erreur. C’est l’Esprit qui a abattu toutes les hérésies sous les pieds de l’Épouse victorieuse ; c’est l’Esprit qui a suscité dans son sein, à tous les siècles, les docteurs qui ont terrassé l’erreur aussitôt qu’elle s’est montrée.

Elle a donc en partage le don de l’infaillibilité, notre Église bien-aimée ; elle est donc vraie en tout et toujours, l’Épouse de Jésus ; et elle doit cet heureux sort à celui qui procède éternellement du Père et du Fils. Mais il est encore une gloire dont elle lui est redevable.

L’Épouse du Dieu saint doit être sainte. Elle l’est ; et c’est de l’Esprit de sainteté qu’elle reçoit la sainteté. La vérité et la sainteté sont unies en Dieu d’une manière indissoluble ; et c’est pour cela que Jésus voulant « que nous soyons parfaits comme notre Père céleste est parfait », et que tout en restant de simples créatures nous cherchions notre type dans le souverain bien, demande « que nous soyons sanctifiés dans la Vérité ».

Jésus a donc remis son Épouse à la direction de l’Esprit, afin qu’il la rendît sainte. Or, la sainteté est tellement inhérente à cet Esprit divin qu’elle sert à le désigner comme sa qualité fondamentale. Jésus lui-même l’appelle le Saint-Esprit, en sorte que c’est sur le témoignage du Fils de Dieu que nous lui donnons ce beau nom. Le Père est la Puissance, le Fils est la Vérité, l’Esprit est la Sainteté ; et c’est pour cela que l’Esprit remplit ici-bas le ministère de sanctificateur, bien que le Père et le Fils soient saints, de même que la vérité est dans le Père et dans l’Esprit, et que l’Esprit ainsi que le Fils aient aussi la puissance. Les trois divines personnes ont leurs propriétés spéciales, mais elles sont unies dans une seule et même essence. Or, la propriété spéciale du Saint-Esprit est d’être l’amour, et l’amour produit la sainteté ; car il unit et identifie le souverain bien avec celui qui en a l’amour, et cette union ou identification est la sainteté qui est la splendeur du Bien, comme la beauté est la splendeur du Vrai.

Pour être digne de l’Emmanuel son Époux, l’Église devait donc être sainte. Il lui avait donne la vérité que l’Esprit a maintenue en elle ; l’Esprit à son tour lui donnera la sainteté, et le Père céleste la voyant vraie et sainte, l’adoptera pour sa fille : telle est sa destinée glorieuse. Voyons maintenant les traits de cette sainteté. Le premier est la fidélité à l’Époux. Or, l’histoire de l’Église tout entière dépose de cette fidélité. Tous les pièges lui ont été tendus, toutes les violences ont été dirigées contre elle, pour la séduire et pour la détacher de l’Époux. Elle a tout déjoué, tout bravé ; elle a sacrifié son sang, son repos, et jusqu’au territoire où elle régnait, plutôt que de laisser altérer entre ses mains le dépôt que l’Époux lui avait confié. Comptez, si vous pouvez, les martyrs depuis les Apôtres jusqu’aujourd’hui. Rappelez-vous les offres des princes, si elle voulait se taire sur la vérité divine, les menaces et les traitements cruels qu’elle a encourus plutôt que de laisser mutiler son symbole. Pourrait-on oublier les luttes formidables qu’elle a soutenues contre les empereurs d’Allemagne pour sauvegarder sa liberté dont son Époux est si jaloux ; le noble détachement qu’elle a montré, aimant mieux voir l’Angleterre rompre avec elle que de sanctionner par une dispense illicite l’adultère d’un roi ; la générosité qu’elle a fait paraître dans la personne de Pie IX, en bravant les dédains de la politique mondaine et les lâches étonnements des faux catholiques, plutôt que de laisser un enfant juif à qui le baptême avait été conféré en danger de mort, exposé à renier l’ineffable caractère de chrétien, et à blasphémer le Christ dont il était devenu l’heureux membre ?

L’Église agit et agira ainsi jusqu’à la fin, parce qu’elle est sainte dans sa fidélité ; et l’Esprit nourrit toujours en elle un amour qui ne calcule jamais en présence du devoir. Elle peut ouvrir le code de ses lois en présence de ses ennemis comme de ses enfants fidèles, et leur demander s’ils pourraient en signaler une seule qui n’ait pas pour objet de procurer la gloire de son Époux et le bien des hommes par la pratique de la vertu.

Aussi, voyons-nous sortir de son sein des millions d’êtres vertueux qui s’en vont à Dieu après cette vie. Ce sont les saints que l’Église sainte produit par l’influence de l’Esprit-Saint. Dans toutes ces myriades d’élus, il n’en est pas un que l’Église ne revendique comme le fruit de son sein maternel. Ceux-là mêmes qu’une permission divine a laissé naître dans les sociétés séparées, s’ils ont vécu dans la disposition d’embrasser la vraie Église quand elle leur serait manifestée, et s’ils ont pratiqué toutes les vertus dans une entière fidélité à la grâce qui est le fruit de l’universelle rédemption : cette Église sainte les réclame pour ses fils.

Chez elle fleurissent tous les dévouements, tous les héroïsmes. Des vertus inconnues au monde avant qu’elle fût fondée, sont journalières dans son sein. En elle il est des saintetés éclatantes qu’elle couronne des honneurs de la canonisation : il est des vertus humbles et cachées qui ne rayonneront qu’au jour de l’éternité. Les préceptes de Jésus sont observés par ses disciples, et il règne en eux comme un maître chéri. Mais ce maître a donné aussi des conseils qui ne sont pas à la portée de tous, et c’est la source d’un nouvel épanouissement de la sainteté intarissable de l’Épouse. Non seulement il est des âmes généreuses qui s’attachent avec amour à ces divins conseils ; mais le sein de l’Église fécondé par le divin Esprit ne cesse de produire et d’alimenter d’immenses familles religieuses, dont l’élément est la perfection, dont la loi suprême est la pratique des conseils unie par le vœu à celle des préceptes.

Nous ne nous étonnerons plus après cela que l’Épouse resplendisse de ce don des miracles qui atteste visiblement la sainteté. Jésus lui a promis que son front serait toujours entouré de cette surnaturelle auréole : or, l’Apôtre nous enseigne que les prodiges opères dans l’Église sont l’œuvre directe du Saint-Esprit.

Que si quelqu’un fait la remarque que tous les membres de l’Église ne sont pas saints, nous lui répondrons qu’il suffit que cette Épouse du Christ offre à tous le moyen de le devenir ; mais que la liberté étant donnée pour être l’instrument du mérite, il serait contradictoire que ceux qui possèdent la liberté fussent en même temps nécessités au bien. Nous ajouterons qu’un nombre immense de ceux qui sont dans le péché, restant membres de l’Église par la foi et la soumission respectueuse aux pasteurs légitimes et principalement au Pontife romain, rentreront tôt ou tard en grâce avec Dieu et termineront leur vie dans la sainteté. La miséricorde de l’Esprit-Saint opère cette merveille par le moyen de l’Église qui, à l’exemple de son Époux, « n’éteint pas la mèche qui fume encore, et n’achève pas de rompre le roseau déjà éclaté ».

Celle qui a reçu, pour le communiquer à ses membres, le divin septénaire des Sacrements dont nous avons exposé la richesse dans le cours d’une des semaines précédentes, comment ne serait-elle pas sainte ? Est-il rien de plus saint que cet auguste ensemble de rites qui donnent les uns la vie aux pécheurs, les autres l’accroissement de la grâce aux justes ? Ces Sacrements établis par Jésus lui-même et qui sont l’héritage de la sainte Église, ont tous leur relation avec l’Esprit-Saint. Dans le Baptême, la Confirmation et l’Ordre, c’est lui-même qui agit directement ; dans le Sacrifice eucharistique, c’est par son action que l’Homme-Dieu vit et est immolé sur notre autel ; il fait renaître la grâce baptismale dans la Pénitence ; il est l’Esprit de Force qui conforte le mourant dans l’Onction suprême, le lien sacré qui unit indissolublement les époux dans le Mariage. En montant aux cieux, notre Emmanuel nous laissait comme gage de son amour ce septénaire sacramentel ; mais le trésor demeura scellé jusqu’à ce que l’Esprit divin fût descendu. Il devait lui-même mettre l’Épouse en possession d’un dépôt si précieux, l’ayant préparée, en la sanctifiant, à le recevoir dans ses royales mains et à l’administrer fidèlement à ses heureux membres.

L’Église enfin est sainte au moyen de la prière qui en elle est incessante. Celui qui est « l’Esprit de grâce et de prières » produit continuellement dans les fidèles de l’Église, les actes divers qui forment le sublime concert de la prière : adoration, action de grâces, demande, élans du repentir, effusions de l’amour. Il y joint chez plusieurs les dons de la contemplation, par lesquels la créature est tantôt ravie jusqu’en Dieu, tantôt voit descendre Dieu jusqu’à elle avec des faveurs qui tiennent de la vie à venir plus que de celle-ci. Qui pourrait compter les respirations de la sainte Église, je veux dire ses épanchements vers l’Époux, dans les millions de prières qui montent à chaque minute de la terre au ciel, et semblent les unir l’un à l’autre dans le plus étroit embrassement ? Comment ne serait-elle pas sainte, celle qui a ainsi, selon la forte expression de l’Apôtre : « sa conversation dans le ciel ? ».

Mais si la prière des membres est si merveilleuse dans sa multiplication et son ardeur, combien plus encore est imposante et plus belle la prière générale de l’Église elle-même dans la sainte Liturgie, où l’Esprit-Saint agit avec plénitude, inspirant l’Épouse, et lui suggérant ces touchants et nobles accents que nous avons cherché à traduire dans la succession de cet ouvrage ! Que ceux qui nous ont suivi jusqu’ici disent si la prière liturgique n’est pas la première de toutes, si elle n’est pas désormais la lumière et la vie de leur prière personnelle. Qu’ils applaudissent donc à la sainteté de l’Épouse qui leur donne de sa plénitude, et qu’ils glorifient « l’Esprit de grâce et de prière » de ce qu’il daigne faire pour elle et pour eux.

Ô Église, vous êtes « sanctifiée dans la vérité » ; et par vous nous sommes initiés à toute la doctrine de Jésus votre Époux ; par vous nous sommes établis dans la voie de cette sainteté qui est votre élément. Que pouvons-nous désirer, ayant ainsi le Vrai et le Bien ? Hors de vous c’est en vain que nous les chercherions, et notre bonheur consiste en ce que nous n’avons rien à chercher ; car votre cœur de mère ne désire que de répandre sur nous tout ce qu’il a reçu de dons et de lumières. Soyez bénie en cette solennité de la Pentecôte où vous avez tant reçu pour nous ! Nous sommes éblouis de l’éclat des prérogatives que la munificence de votre Époux vous a préparées, et dont l’Esprit-Saint vous comble de sa part ; et maintenant que nous vous connaissons mieux encore, nous promettons de vous être plus fidèles que jamais.

 

Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :